vendredi 19 février 2016

Atelier d'écriture pour caissières de supermarché en milieu rural - par Michèle Cartelot et Catherine Lesaffre



1- Comment en vient-on à imaginer un atelier d'écriture pour des caissières de supermarché ?

Michèle :
J'ai ce défaut ou cette qualité de toujours, où que j'aille, où que je passe, imaginer ce que peuvent ressentir les personnes, en particulier lorsqu'il m'apparait que les choses ne vont pas de soi.
J'appelle cela mon "empathie chronique".
Les caissières de supermarchés, certainement parce que je les croise presque tous les jours, m'ont toujours attendrie.
Ces femmes (c'est un métier presque exclusivement féminin) qui, malgré l'appellation  "hôtesse de caisse" qui voudrait redorer leur image mais qu'aucun client n'utilise, font un travail ingrat, usant et jamais rémunéré à la hauteur de sa pénibilité.
Elles sont rivées à leur siège, condamnées à manutentionner des quantités invraisemblables d'articles, à voir défiler des centaines de clients plus ou moins aimables, à subir des horaires compliqués,  des interdictions de boire et de bouger ... à devoir coûte que coûte, rendre la monnaie, sourire, répéter, répéter, répéter ...
De quel bois sont-elles faites pour rester polies, droites et souriantes ? Qui sont-elles ? De quoi rêvent-elles ? Pour qui votent-elles ?
Voici maintenant l'anecdote qui est à l'origine de cette idée d'atelier d'écriture pour caissières de supermarché en milieu rural :
Lorsque je retourne dans ma province natale, je croise souvent un ancien professeur d'histoire. Là-bas, c'est sur le parking et dans les rayons de l'Intermarché que les gens discutent. Max est heureux de me voir et de pouvoir échanger avec moi sur la vie locale, sur des questions sociétales, sur la politique.
Un jour, il m'a confié son désarroi. Les caissières qui le connaissent bien et l'apprécient,  l'ont pris un jour à partie : "Alors, monsieur A, vous aussi, n'est-ce pas, vous allez voter Marine Le Pen ?  Enfin quelqu'un qui nous défend, une femme, en plus". Le FN, nouveau parti des travailleuses !
Loin de moi l'idée d'un atelier d'écriture CGT ou thérapeutique mais ... écrire, créer, mettre de soi, échanger est peut-être une petite porte qui permet de libérer quelques frustrations, quelques difficultés, d'oxygéner les rêves, les espoirs et ne pas tout cristalliser sur un bulletin de vote.
Autre chose : l'atelier d'écriture que j'ai mené l'année dernière en EHPAD pour les résidents et auquel se sont ralliées spontanément des aides-soignantes m'a confortée dans le bénéfice des ateliers en milieu rural. J'ai constaté leur enthousiasme et le plaisir évident qu'elles avaient à prendre le stylo ... en toute confiance.

Catherine :
Je propose à Michèle de faire équipe avec elle et aussitôt, elle me parle de son idée d'atelier pour caissières de supermarché. Une bulle s'ouvre au dessus de ma tête :
Michèle en tee-shirt de supère héroïne faisant germer et récoltant les mots de ces femmes (et quelquefois hommes) qui remplissent et prolongent de leurs corps les caisses enregistreuses des supers marchés avec lesquels ils ne font qu'un, où nous réglons nos courses faites le plus souvent au pas de course.
Comment font-elles pour être presque toujours aimables et gentilles, tout en répétant les mêmes mots et les mêmes gestes à longueur de temps dans un environnement de bruits et mouvements incessants.
Je lui réponds légèrement perplexe « quelle bonne idée » en me disant que je vais par l'écriture me projeter dans un territoire inconnu d'où il me semblerait plus facile de s'évader que de vouloir y rester. Je songe à ces jeunes filles sans diplômes à qui leur famille jette en anathème qu'elles vont finir « caissières au super marché », la malédiction suprême. Oui décidément quelle bonne idée. Inattendue, remuante. Caissière en milieu rural me précise Michèle. Chez ma mère, dans la campagne normande, bien sûr que ça vote FN, ou plutôt, Marine, comme une copine. Dans quel espoir, je ne sais pas. Alors, voyons si je parviens à me projeter au milieu d'elles, par la magie de l'écriture virtuelle commune échangée.
Mais bientôt, le challenge dans toute sa réalité me tape par derrière sur l'épaule. C'est que, relativement au super marché, mentor de la consommation, mon œil a tendance à voir rouge et l'instauration d'un atelier en un tel lieu, le supermarché, je le répète, va forcément nécessiter de pactiser et louer son âme au diable, tel Lydie Salvayre dans son portrait de l'écrivain en animal domestique.
Je m'efforce de garder mon calme. Je suis de la plèbe, je fraternise, et mon slogan, l'écriture pour tous, doit-être porté en avant, carcasse tremblante ou pas, nécessaire compromission auprès de la direction ou non.

2.  Association de malfaiteuses en supermarchés : jusqu'où aller ?

Faire écrire les caissières, leur enlever la douchette des mains, les mettre autour d'une table et plus dos à dos, utiliser et détourner les mots de la distribution, les tickets de caisse, la relation client pour les emmener ailleurs, les faire renouer avec l'écrit, avec elles-mêmes et un imaginaire souvent étouffé sous le quotidien. Quel programme !

Nous nous prenons soudain à rêver de faire écrire toutes les caissières de France et de Navarre. Nous imaginons un atelier d'écriture pour caissières que nous pourrions proposer à une enseigne de magasins sur toute la France, à tous les Auchan, à tous les Intermarché ou restreindre notre champ d'intervention à une région, à un département ou encore à un groupement de communes, pour tous les supermarchés toutes enseignes confondues.
Mais comme nous sommes deux femmes avec la tête sur les épaules (heu fait Catherine) (mais si, mais si, rétorque Michèle !), nous savons bien que la réussite d'un projet dépend avant tout de sa faisabilité.
Nous décidons donc de commencer petit. Animatrices bénévoles, salariées par ailleurs et étudiantes de surcroit, avant de nous métamorphoser en trust international de l'écriture managériale de la grande distribution « M&C Cie de la Caisse aux Mots » d'intervenir sur un seul magasin.
Et pourquoi pas celui en Picardie ?


3. Quel sera notre public, qui sont ces femmes ?

Les caissières de la commune n'ont, pour la plupart, jamais quitté leur région, voir leur village natal. Elles ont entre 25 et 50 ans. Les plus âgées ont été recrutées sans diplôme, les plus jeunes sont titulaires d'un CAP commerce multi spécialités ou bac pro commerce dispensés par un lycée professionnel situé à 10 km.
Dans cette commune de la Somme, le taux de chômage dépassait 20% en 2012 (sources Insee) et les perspectives d'emploi pour les femmes se limitent aux emplois d'usine et aux emplois familiaux (aide à la personne et assistantes maternelles).
Les salaires ne dépassent guère le SMIC.
Leur vie est centrée sur la famille. Leur commune est "quasi morte", les difficultés économiques replient les habitants sur eux-mêmes et les loisirs sont rares : pas de piscine, un cinéma fermé depuis trente ans, le plus proche se situant à 20 km, une salle des fêtes avec quelques spectacles, une médiathèque inaugurée en 2011 mais presque uniquement fréquentée par les écoles et le collège.
Toutes savent lire et écrire, elles ont gardé un rapport à l'écrit très imprégné du scolaire, du bien faire et du mal faire. La crainte exprimée de faire des "fautes d'orthographe" tombe pourtant très vite (on a l'impression qu'elles ne demandent que cela) lorsqu'elles sont mises en confiance. Si le complexe de l'orthographe tombe, le reste suit, l'écrit cherche moins à se conformer à une norme et la "parole" écrite peut se libérer.
Leur rapport à la langue est donc à prendre en compte. Il faut préciser qu'un atelier d'écriture en région parisienne avec des caissières souvent d'origine étrangère, qui, pour certaines, maitrisent difficilement la langue orale et peut-être à peine l'écrit, serait totalement différent, il faudrait cerner le profil du groupe et définir d'autres objectifs pour l'atelier.
Il n'y a pas un profil "caissières" unique. D'ailleurs, ceci est valable pour tous les ateliers d'écritures. Il y a toujours des spécificités locales et inhérentes à tel ou tel groupe sans compter les personnalités.


4. Le dispositif que nous proposons :

a/A quel endroit :

Dans la joie et la bonne humeur, nous projetons d'installer l'atelier au cœur de l'Intermarché, sur des tables de jardin du rayon jardinerie, nous imaginons planter les crayons dans le rayon "Planta fin", tremper les plumes dans les meilleurs crus des Vins et spiritueux sous la bénédiction d'un gérant qui, non seulement, aurait prêté les locaux mais aurait profité de l'opportunité pour offrir à ses employées un moment de convivialité avec quelques gourmandises à la clé mais ... halte-là, principe de réalité oblige.

Il s’ensuit pour nous une intense réflexion sur l'argumentaire à déployer auprès de la direction, pour solliciter l'autorisation d'un atelier d'écriture à l' intérieur du magasin et sur les horaires de travail.

Première approche par courrier à adresser au chef de projet régional de l’enseigne :

Projet de courrier :
Madame, Monsieur,

Nous sommes une jeune équipe de rédacteurs et écrivains, diplômés des métiers de l'écriture de l'université de Cergy-Pontoise (Val d'Oise).
Dans le cadre de notre spécialité « ateliers d'écritures », nous avons mis au point un panel de propositions destinées à être expérimentées sur site, directement en milieu professionnel privé. A l'heure où les chefs d'entreprises intègrent de plus en plus le bien-être de leur personnel dans leurs approches managériales comme facteur de réussite du groupe, il nous a semblé que notre proposition spécifique « atelier d'écriture pour caissières de supermarchés en milieu rural », pourrait être à même de vous intéresser, concernant votre magasin de xxxxx, bien connu de l'une de nos animatrice, Madame M.C.V.

En effet, conjointement à la montée en puissance de l'utilisation des réseaux sociaux, l'écriture comme expression de soi et « lâché prise », mais également comme facteur d'ouverture au monde en général et par suite à celui du travail en particulier, connaît à l'heure actuelle une popularisation et un engouement irrépressible. Sans vouloir nous faire le porte-parole d'une vision pessimiste d'un monde surpeuplé croulant sous le poids des difficultés, il faut bien reconnaître, en brossant un portrait en grande largeur pour ne pas abuser de votre temps, que le système économique mondial, caracolant comme un cheval sauvage plus ou moins maîtrisé par nos nouveaux Bellérophon, se heurte de plein fouet à un déploiement de violences de toutes natures qui nous laisse, nous, individus, vous, chaque membre de votre personnel, sans voix, avec, à l'intérieur, quelque chose qui monte comme un futur cri.
L'écriture, la plus humble fut-elle, en est le récepteur et l’équaliseur. Il est de notre intérêt, à tous, humains, d'en favoriser la percée en l'intégrant à nos fonctionnements. A court terme, la pratique de l'écriture est un outil moderne et innovant destiné à faciliter un quotidien ouvert et communiquant. Au niveau de l'entreprise, un marketing efficace commence par une mise en œuvre de conditions d’exercice de la profession véritablement harmonieuses au sein du personnel et en particulier du personnel en contact constant et quotidien avec la clientèle. Avant de donner une nouvelle dimension à sa communication au travers de packs storytelling alléchants, il peut s’avérer efficace d’optimiser l'ambiance interne pour surprendre la clientèle, et d'abord, en finir avec l'hôtesse de caisse machine. C'est pourquoi nous nous tournons vers vous pour vous faire la proposition suivante :

Animation au sein de vos équipes, en commençant par les hôtesses de caisse, de dix ateliers d'écriture de une heure un quart chacun, toutes les semaines durant deux mois et demi.

Les ateliers de difficultés croissantes, ont une valeur apaisante, décontractante et auto formatrice sans effort. Chacun en effet peut mesurer l'impact positif sur soi, de parvenir à un résultat dans un domaine qui lui est à priori complètement étranger.

Déroulement : une table ronde est installée à l'intérieur du magasin à un endroit stratégique pour ne pas gêner la clientèle, et reçoit un groupe constitué des hôtesses de caisse en pause.
Ou bien, les ateliers se tiennent en dehors des heures d'ouverture, par exemple le lundi de onze heures à midi un quart. La direction offrant une collation à l'issue de l'atelier avant l'ouverture et prise de travail à treize heures.
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A ce point de notre réflexion, je contacte une amie directrice de communication chez 3 M, qui me contre de la manière la plus ferme. Au grand jamais, me dit-elle, vous ne parviendrez à convaincre un chef de projet de la Grande Distribution, de l'intérêt marketing de votre projet d'atelier, à court ou à moyen terme. Il faudrait que le susdit eût un volet formateur mais au niveau des hôtesses de caisse, je ne vois pas lequel, ajoute-t-elle. Nous devons revoir notre copie.

Heureusement, Michèle a plus d'un tour dans son sac, dont elle extrait aussitôt un fabuleux joker : 
Une ancienne ferme en centre ville entièrement rénovée et transformée en médiathèque (avec l'argent du contribuable sceptique), au bénéfice de la Culture ! Et de surcroît le maire est un ami. Le contacter, lui faire part du projet, lui faire valoir l’opportunité d’une telle action, favorisant la promotion de la médiathèque (insuffisamment fréquentée), auprès de ses habitants. Le maire, enchanté, proposera certainement aux nouvelles Perrette que nous sommes, d'offrir le goûter aux participants. C'est la fête ! Il ne reste plus qu'à convaincre quelques caissières, qui parviendront ultérieurement à grossir les rangs, face au succès évident du premier atelier ! Et à déterminer ensemble le jour et l'heure d'une telle entreprise … hors cocon et obligations familiales ? Qu’à cela ne tienne !
Retour à la case réflexion : comment va-t-on procéder pour les convaincre de dériver des habitudes ancrées et venir écrire ? Trouver le déclic. Un seul oui déclencheur de deux autres. Sortir de sa passivité plus ou moins contestatrice, grognonne cachée, en venant exprimer son insatisfaction satisfaite par un biais nouveau, convivial. Entamer sa gym des méninges à base de ludique. Un étrange et nouveau bon moment entre travailleuses solidaires.

b/ Quand ? Jour et horaire :
Une fois par semaine le lundi matin à la médiathèque de 10h à 11h30, thé, café, viennoiseries offerts par Dany le Maire.

c/ Combien de personnes ?
Faire un sondage préliminaire. Obtenir un minimum de trois personnes au premier atelier, en espérant que le nombre de participants passe ensuite à cinq, et de fil en aiguille parvienne à dix.


d/ Durée et fréquence à définir
Une heure trente (voir décompte des différentes phases ci-après).
Dix séances sur dix semaines.

e/ Quelques suggestions de noms auxquels nous avons pensé pour cet atelier :
De la douchette au crayon
La quinzaine créative des caissières
Les six jours des caissières créatives
Rayon crayons
Promotion création pour hôtesses de caisse
Nos caisses en création
A cause de l’écriture
Bon salut j’vais écrire
Pause crayons
Confiture d’écriture
Paniers d’écrits
A vos marques écrivons

f/ Historique :
On suppose que l’atelier est constitué de dix séances et que la proposition du jour détaillée ci-après correspond à la cinquième séance. Les caissières sont déjà rodées.
Elles se sont par exemples précédemment attaqué aux propositions suivantes :
·       Rayon alcool : "Après mon troisième verre de Vodka ...
·       Rayon fromages: "Nouveaux fromages " en mots-valises ex : le Gruyochon, le Camenthal, le Reblomolette ... puis enchainer en inventant son histoire, sa région ...
·       Rayon fruits et légumes : "Annonces matrimoniales" Petite pomme paumée recherche ...ou Poire bien mûre ... ou Banane au régime ...
·       Rayon surgelés  : Petit Cluedo sanguinaire et mini polar aux surgelés viande :" Le colonel bœuf a tué dans la véranda le docteur foie de veau avec une tronçonneuse ». Recette de cuisine et mode d’utilisation défouloir « Madame Quiche, serial killeuse de son état, a été cuisinée par la police pendant 24h …. »
·       Le ticket de caisse : "Dresser la liste de tout ce qui nous est cher dans la vie et l'établir sous forme de ticket de caisse, avec TVA, réduction ..."
·       La liste de courses : "Faire la liste de nos espoirs, réalisables ou pas"
·       Les clients : "Galeries de portraits"

g/ Chaque atelier commence par un rituel d'échauffement où chacun écrit anonymement des phrases courtes à déposer dans des emballages.
   Un espoir dans un paquet de Pépito
   Une colère dans un sac à pommes de terre
   Un souvenir d'enfance dans un paquet de madeleines
   Un mauvais souvenir qu'on voudrait effacer dans un paquet lessive
   Une tristesse dans une boite de mouchoirs
   Une contrariété, une amertume dans un bocal de cornichons
   Un mot doux, une douceur dans un paquet de coton
   Un plaisir dans un paquet de sucres en morceaux
   Un truc idiot dans un paquet de nouilles
   Une petite vacherie (parce que la boite est petite) dans une boite de Vache qui rit
   Une phrase choc dans une tablette de chocolats
   Une drôlerie dans un paquet de riz
   Un mot aimable dans une boîte de carottes
   Un mot d’amour dans un paquet de rasoirs jetable
   Un désir dans un paquet de café
   Un mouvement de gym dans un pack de jus d’orange
   Un SOS dans une boîte de sardines
   Un cri de victoire dans une boîte à camembert (Le sapeur et mam’zelle Victoire)

A la fin de l'atelier, nous envisageons d'éditer un recueil collectif de toutes ces phrases.

5 L'atelier du jour :

Objectif :
Détourner les slogans publicitaires avec les mots qui sont venus à l'esprit, pour en faire des phrases à soi qui serviront à amorcer de petites histoires.

Il commence par le rituel d'échauffement décrit précédemment.
Temps d'écriture : 10 minutes.


La proposition d'écriture du jour va comporter plusieurs phases.

Énoncé de la première phase de la proposition d'écriture

"Vous allez d'abord prendre une feuille et écrire :
un adjectif qui vous vient à l'esprit
un nom commun
un nom propre (un lieu, une personne)
un adjectif supplémentaire
un autre nom commun
un sentiment éprouvé par vous-même ou quelqu'un d'autre
un défaut ou une qualité."
Temps d'écriture : 5 minutes

Pour amorcer la deuxième phase de la proposition d'écriture, on lance un jeu de devinette collectif sur des slogans publicitaires qui aura en plus le mérite de détendre l'atmosphère.
Il s'agit de lire le début de chaque slogan sans dévoiler la marque, les caissières devinent ou plutôt retrouvent la suite. Rires assurés
Voici la liste des slogans :
Amora : Par amour du gout.
Badoit : Peut-on envisager un repas sans Badoit ?
Bonduelle : Quand c’est bon, c’est Bonduelle
Bosh : C'est grand, c'est bien, c'est Bosh
Boursin : Du pain, du vin, du boursin
Calgon : Le lave-linge dure plus longtemps avec Calgon
Carglass : Carglass répare, Carglass remplace.
Carte Noire : Un café nommé désir.
Cdiscount: Créateur de pouvoir d’achat
Chocapic: C’est fort en chocolat.
Cochonou : Le bon saucisson comme on l’aime chez nous.
Danette : On se lève tous pour Danette.
Durex : Love, sex, Durex.
Findus : Heureusement qu’il y a Findus.
Freedent : Pour des dents belles et fortes.
Frosties : Le tigre est en toi.
Gilette : La perfection au masculin.
Gini : La plus chaude des boissons froides.
Haribo : C’est beau la vie, pour les grands et les petits !
Heineken : La bière qui fait aimer la bière
Herta : Le gout des choses simples.
Intermarché : Tous unis contre la vie chère.
Kiri : Le fromage des gastronomes en culottes courtes.              
Kit-Kat : Have a break. Have a Kit-Kat
Lactel : L’essentiel est dans Lactel.
Leroy Merlin : Et vos envies prennent vie !
Malabar :  Quand y’en a marre, y’a Malabar !
McCain : C’est ceux qui en parlent le moins qui en mangent le plus
Mentos : Le déclic fraîcheur.
Nutella:  Il en faut de l’énergie pour être un enfant.
Planta Fin: Le fin du fin, c’est Planta Fin.
Tropico:  Quand c’est trop, c’est Tropico !
Temps du jeu devinettes : 5 minutes

A la fin du jeu, on retourne un panneau sur lequel on les a tous écrits.

Enoncé de la deuxième phase de la proposition :

"Vous reprenez la feuille sur laquelle vous avez écrits les mots tout à l'heure. Parmi tous les slogans affichés, vous allez en utiliser plusieurs auxquels vous enlèverez un ou des mots pour y mettre les vôtres à la place. Vous devez utiliser tous vos mots, plusieurs fois, si vous le souhaitez."
Temps d'écriture : 10 minutes

Nous demandons à chacun de lire ses phrases à voix haute. Réactions des uns et des autres autour de la table, bienvenues. Nous accueillons tous les commentaires, les rires et les sourires, autant d'échos aux imaginaires des uns et d'autres.
Temps de lecture et réactions : 10 minutes

Enoncé de la troisième phase de la proposition :

"Maintenant, vous allez reprendre au moins une de vos phrases et nous écrire la suite."
Temps d'écriture : 20 minutes
Restitution 15 minutes

Idée d'ouverture sur atelier d'écriture avec les clients intéressés (contaminés par les hôtesses), à la médiathèque. On pourra faire des propositions élargie à la vie de la commune, à l’environnement, à la vie post moderne en milieu rural, le tout sur fond de propositions littéraires adéquates.

Propositions de lecture :

" Tu vois, si tu ne travailles pas bien à l'école, tu finiras caissière comme la dame. " C'est dit. C'est pesé, emballé, étiqueté. Et pourtant... Elle s'appelle Anna, elle a vingt-huit ans, un diplôme universitaire de littérature et huit ans d'expérience derrière une caisse de supermarché. Une caisse qui n'entend que les codes-barres. Un métier peu propice aux échanges, invisible, des gestes automatiques... Entre les bips qui ponctuent ses journées, Anna aurait pu se sentir devenir un robot si elle n'avait eu l'idée de raconter son travail. Au fil des jours, ces menues anecdotes qui la font rire, l'agacent ou l'émeuvent sont ses tickets de caisse à elle. Elle vous a vu passer à la caisse. Vous avez été des clients faciles ou des emmerdeurs, riches ou pauvres, complexés de la consommation ou frimeurs. Vous l'avez confondue avec une plante verte ou vous lui avez dit bonjour, vous avez trépigné à l'ouverture du magasin ou avez été l'habitué nonchalant des fermetures. Anna, vous l'avez draguée, méprisée, insultée. Il ne se passe rien dans la vie d'une caissière ? Maintenant, prenez votre chariot et suivez Anna jusqu'à sa caisse. Celle que vous oubliez de voir vous a bien vu et raconte. Anna Sam a vingt-huit ans, elle est titulaire d’une licence de lettres modernes et a travaillé plusieurs années dans la grande distribution.

Cela fait longtemps que Julie ne croit plus aux contes de fée. Caissière dans un supermarché, elle élève seule son petit Lulu, unique rayon de soleil d'une vie difficile. Pourtant, un jour particulièrement sombre, le destin va lui tendre la main. Emu par leur situation, un homme les invite dans sa maison du bord de mer, en Bretagne. La chance serait-elle enfin en train de tourner pour Julie ? Dans ce roman où l'émotion est présente à chaque page, elle nous fait passer avec une énergie communicative des larmes au rire, elle nous réconcilie avec la vie.






Pendant un an, Annie Ernaux a tenu le journal de ses visites à l'hypermarché Auchan du centre commercial des Trois Fontaines situé en région parisienne. "Voir pour écrire, c'est voir autrement ", écrit-elle. On redécouvre en effet à ses côtés le monde de la grande surface. Loin de se résumer à la corvée des courses, celle-ci prend dans ce livre un autre visage : elle devient un grand rendez-vous humain, un véritable spectacle. Avec ce relevé libre de sensations et d'observations, l'hypermarché, espace familier où tout le monde atteint la dignité de sujet littéraire.






Les temps sont durs, la poésie ne nourrit pas son homme - ce qui pousse Juana à chercher un emploi. Sans diplôme, elle accepte une place de caissière dans une Grande Surface. Le monde des supermarchés est, pour la tête rêveuse d'Emmanuel, plus éloigné que l'Afrique. Ce qu'il en découvre, à travers l'expérience de Juana, le plonge dans des abîmes de perplexité. Jouant sur le décalage entre deux univers, Michel Waldberg nous offre un portrait cruel et drôle de "l'horreur économique" de notre société "ouverte".






Roman drôle et émouvant raconte la vie ordinaire de Michèle, caissière dans un hyper de Picardie, qui observe sans complaisance l'univers de la grande distribution. Mais la nuit, Michèle rêve. Elle se voit différente. Conquérante. Et, imperceptiblement, ces rêveries inattendues vont permettre à cette femme seule de renaître à la vie.
 De temps à autre, il y a un miracle. Un gamin tranquillement assis dans le caddie qui lui décoche un sourire d'ange et un parfait « Bonjour madame ». Quelques enfants, plutôt rares, plutôt des petits garçons, s'informent. C'est la litanie des « Pourquoi ? ». Pourquoi t'es là, pourquoi t'es habillée comme la dame d'à côté, pourquoi tu fais un petit bruit, pourquoi t'es toujours assise, est-ce que tu es fatiguée ? Pourquoi tu fais ça ? Un jour, un mouflet lui a même balancé avec un air important : « Tu sais, mon père y dit qu'tu fais un boulot de con. » Le minot n'avait même pas l'air méchant. Non, pour lui c'était simplement une évidence. Michèle était restée silencieuse. D'abord, lui claquer le bec à ce morveux lui aurait attiré des ennuis, et le pire, c'est qu'il n'avait pas forcément tort.
Rien ne prédestinait Michèle, la cinquantaine, à travailler dans la Grande Distribution. Mais le décès subit de son mari lui impose d'accepter un poste de caissière dans un hyper planté en pleine zone industrielle, sous la brume grise et humide de Picardie. Se lever aux aurores, prendre le bus, retrouver ses collègues, faire attention aux clients, au Chef, et, à la fin de la journée, rentrer dans sa maison vide... Un quotidien d' « hôtesse de caisse ». Tant pis si l'élégance hypocrite du titre ne garantit ni la correction de l'employeur ni la courtoisie du client. Mais la nuit, Michèle rêve. Elle se voit différente. Conquérante. Gagnante. Les jours changent alors imperceptiblement. Elle qui subissait sa vie se met à prendre des décisions, à provoquer des rencontres, s'extirpant peu à peu du malheur. Un roman drôle et moderne servi par une écriture piquante où chacun pourra puiser une belle leçon d'humanité et de courage.


Pour les petits : A partir de 7 ans. Que se passerait-il si un loup quittait la forêt pour entrer en ville et se rendre au supermarché ? Que se passerait-il si le loup y rencontrait un prince déguisé en homme ordinaire ? Si le prince conseillait au loup de se faire passer pour un simple chien ? Que se passerait-il ensuite si le prince tombait amoureux d’une caissière si belle qu’elle pourrait être une princesse déguisée en caissière ? Que se passerait-il enfin si la caisse du supermarché se métamorphosait en coffre-fort dans une explosion ?





Extraits :
Au bonheur des dames - Emile Zola
Le ventre de Paris - Emile Zola

Test réalisé :
(Une artiste-serveuse de restaurant, un animateur fonctionnarisé, un jeune artisan d’art au chômage)

Nous notons une plus grande difficulté à travailler sur les slogans choisis, si tous les mots de ceux-ci ont été remplacés. En effet, à ce moment, le slogan a tendance à disparaître complètement. Seule demeure sa structure grammaticale, ce qui n’est pas suffisant pour la lisibilité de son détournement. Par conséquent, garder au moins un mot du slogan s’avère plus drôle et plus efficace pour son utilisation.
Par exemple :
Sur la base de « par amour du goût », on a eu : « par amour des poissons… », conservation du mot amour.
Sur la base de « C’est beau la vie pour les grands et les petits », on a eu : « C’est beau la joie pour les grands et les citrouilles », conservation de deux mots : beau et grand.
Sur la base de « Carglass répare, Carglass remplace », on a eu « Martha répare, Martha rend bleu et orgueilleux », conservation d’un verbe clef.
Par ailleurs, il a paru spontanément indispensable à l’un des participants de rajouter des mots ne figurant ni dans les slogans ni dans les mots choisis.
Exemple :
Sur la base de « par amour du goût », on a eu : « par amour des poissons, pour tous les poisseux qui plongent du haut des pontons », phrase dans laquelle on trouve un mot du slogan initial (amour), deux mots parmi les mots choisis (poissons et pontons), et deux mots rajoutés (poisseux et plongent).
Cette prise de liberté inventive par rapport à la consigne nous a semblé bénéfique.
Par suite, nous nous sommes interrogées sur l’opportunité de rajouter les précisions ci-après à la consigne initiale.
Consigne initiale :
"Vous reprenez la feuille sur laquelle vous avez écrits les mots tout à l'heure. Parmi tous les slogans affichés, vous allez en utiliser plusieurs auxquels vous enlèverez un ou des mots pour y mettre les vôtres à la place. Vous devez utiliser tous vos mots, plusieurs fois, si vous le souhaitez."
Précision :
Pour parvenir à intégrer tous vos mots choisis et éviter d’avoir à en rajouter, qui ne soient ni dans le slogan initial, ni dans vos mots choisis, il est préférable de sélectionner au moins trois slogans et veiller à conserver un mot de chacun des trois slogans initiaux.





A l’issue des différents retours sur notre atelier et pour faire suite à la demande qui en découle, nous présentons ici pour conclure, une ouverture sur la troisième phase.

Comment faire écrire un texte qui intègre les nouveaux slogans ? Qui les prononce ? Quel genre de client ? « De l’humain avant toute chose ! »

Il y a un effet de progression dans la proposition. La personne à qui l’on s’adresse, mettons le client, aura choisi des mots, spontanément, comme demandé, en écriture automatique. Puis, elle aura choisi au moins trois slogans pour pouvoir affecter tous ses propres mots, en conservant un mot aux slogans sélectionnés pour en éviter la disparition. Cela est assez facile et ludique. A partir de là, il y aura, nous l'espérons, un défi personnel à vouloir poursuivre jusqu'à l'écriture d'une petite histoire, en raison de l’envie de faire vivre les slogans ainsi détournés et pas seulement partir en les ayant en-tête.

Par exemple, un homme d'âge mûr, très gentil et un peu bourru, infographiste de son état, peu fortuné et déprimé sur l'état du monde et sur sa propre condition d'existence.
Il a choisi les mots suivants : moche / dégueulasse / crotte / cadavre / Tchernobyl / tristesse / minérale (pour désigner une qualité). Et les slogans, « quand y'en a marre, y'a malabar / Du pain, du vin, du bourcin / Le fromage des gastronomes en culottes courtes.
Il choisit de substituer de la manière suivante : quand y'en a marre, y'a Tchernobyl / Du moche, de la crotte, du cadavre / Le fromage dégueulasse des gastronomes en tristesse minérale. Et de développer les trois slogans en un seul texte. Cela donne :

Mais qu'est-ce que nous sommes bien venus mal faire sur cette planète ? Est-ce que quelqu'un va finir par me le dire avant que je ne disparaisse, oui ou non, comme ma malheureuse copine sur son lit d'hôpital avec ses cheveux tombés et ses aiguilles de partout ? J'aurais pu choisir de vous dire : heureusement, il y a la batterie ! Et non Findus. La batterie sur laquelle je tape comme un dératé pour entrer en transe et oublier ! Oublier que je n'ai pas aimé, que je n'ai pas été aimé, et que ma seule amie s'envole en lambeaux ! Alors oui, quand y'en a marre, y'a Tchernobyl, pour sûr, pour que ça cesse un bon coup et qu'on n'en parle plus ! Je vous entends bien me dire, vous, la fille quémandeuse avec votre mèche blanche prête à exploser en roux, que ça va mieux en l'écrivant ! Mais j'ai peur que ça ne soit que bidon ; car en vrai y'a que ça, du moche, de la crotte et du cadavre ! Alors c'est ça la vie ? Ce fromage dégueulasse des gastronomes en tristesse minérale ? Vous voyez, pourquoi il faut absolument savoir, pourquoi on est là, avant d'en finir ! Parce que moi, Madame, moi qui vous écrit si durement, en cassant ma mine ou plutôt la vôtre, sur ce papier si gentiment prêté, je ne peux même pas me transformer en animal lubrique, voyez-vous ! Alors je tape sur ma caisse claire je tape, moi je tape sur ma caisse claire, moi je tape …



Exemple de texte libérateur. Après ça, on a bu un coup, il a ri, on est allé au ciné se fondre dans la toile.


F I N