mercredi 23 janvier 2013

La twittérature



« Plus le temps de lire tous les chefs-d’œuvre, plus de place dans les maisons !» : que devient ce que proclamait en 1888 la préface de l’ouvrage « Les auteurs concentrés», à l’heure pressée d’Internet ? Les Canadiens qui ont créé un « Institut de twittérature comparée » nous montrent malicieusement une des voies contemporaines de cette littérature express. La twittérature se saisit du format du tweet et de ses habitudes de transcription (abréviations, renvoi par hashtag....) et révèle que la brièveté n’est pas toujours incompatible avec l’activité interprétative du lecteur.

Que nous révèle la contrainte des 140 caractères de notre lecture des œuvres ?
- 1er défi : résumer un roman du XIXème siècle en 3 tweets
- 2ème défi : adopter le point de vue de deux personnages, interprétant l’histoire à leur manière
- 3ème défi : synthétiser l’opinion différente de deux lecteurs
-4ème défi : prolonger le roman en l’espace d’un tweet !

A rebours, Huysmans
twitté par Elodie Wotling

Des Esseintes, décadent, est usé de Paris, ville où il a tout fait, tout vu. Il se retire dans une maison tranquille.

Là-bas, il s'entoure de tout ce qui représente pour lui la beauté. Il catalogue les œuvres d'art qu'il aime et admire.

Mais il reste lassé de la vie et retourne à Paris. Il sait qu'il ne trouvera son bonheur nulle part.

Personnage 1
@DesEsseintes : Le beau, je le crois, peut me sortir de mon mal de vivre. Embellir la nature peut être une solution. #Désespoir
Personnage 2
@LaTortue : Des Esseintes est un fou qui croit m'embellir en décorant ma carapace. J'aurais préféré rester tranquille. #RIP


Lecteur 1
C'est juste l'histoire d'un perdu qui ne sait plus quoi faire pour se sortir de son ennui. Après Paris, il tente la campagne. #JePréfèreLireZola
Lecteur 2
Mais non, c'est une réflexion sur l'art, sur le style, sur la beauté, sur le rapport entre l'art et la vie. #HuysmansIsTheBest


La phrase ultime
Des Esseintes n'avait plus qu'à attendre, et frapper, encore et encore, aux portes de la mort.



L’éducation sentimentale, Flaubert
twitté par Anne Marti-Cavallé

Frédéric Moreau, jeune homme de 18 ans, ambitieux mais rêveur, croise le regard de Mme Arnoux, bourgeoise déjà mariée, et en tombe fou amoureux.
(144 caractères)
A Paris, il s’amuse avec Rosanette, une cocotte, tandis que Mme Arnoux lui échappe, comme ses études de droits et ses idéaux révolutionnaires.
(143 caractères)
A force de vivre dans les rêves et de ne faire aboutir aucun projet, le temps passe et il vieillit. Finalement, il comprend qu’il a raté sa vie.
(144 caractères)
Le point de vue de Frédéric :
Du début à la fin de ma vie, je n’ai cessé de m’accrocher à des chimères. Mme Arnoux et mes idéaux républicains sont partis en fumée et je n’ai rien fait.
(152 caractères)
Le point de vue de Deslauriers :
La politique comme le journalisme n’ont pu me réussir, car malgré mon ambition et ma volonté, j’ai manqué d’argent et de relations.
(131 caractères)

Lecteur 1
Frédéric est un personnage velléitaire et pathétique. Même avec les femmes, il est pleutre. On n’a pas envie de le plaindre car c’est sa faute s’il a raté sa vie.
(162 caractères)
Lecteur 2
Quelle misère cette société où plus rien n’est possible, les idéaux condamnés à l’échec ! Tous prisonniers de la société, c’est ça le message ? 
(145 caractères)
La dernière phrase
Cette éducation sentimentale a bien été à l’image de la société d’aujourd’hui : condamnée à l’échec dès ses prémisses.
(118 caractères)

Le colonel Chabert, Balzac
twitté par Laure Jaen

Le colonel Chabert de la grande armée survit à la bataille d’Eylau alors que tt le monde le croit mort, il revient méconnaissable.

Sa femme s’est remariée ac Ferraud et a eu 2 enfants grâce à sa rente. Chabert va voir l’avoué Derville, le seul à le croire, pr tt récupérer.

Sa femme ne vt rien lui rendre et lui demande mm de renier son nom pr la laisser heureuse. Il la méprise et part finir sa vie ds un hospice.

Selon sa femme
 Chabert, mon goujat d’ex-mari veut piquer tt notre pognon ! Il était bien mieux mort à Eylau ! Qu’il soit fou ou pendu ! Mon misérable…
Selon Derville
 Devant mon pauvre ami le colonel Chabert, seul à le reconnaitre j’étais, seul à lui tendre la main je fus. En vain, l’avocat a perdu.

1er lecteur
 C’est la fin de l’époque Napoléonienne ! Hyacinthe Chabert en fait les frais ! Il a tout perdu, même son identité !
2ème lecteur
 Chabert est un homme qui se bat pour exister ! Ms il refuse les solutions de son avocat Derville pr garder sa dignité ! La loi ne sert à rien !

La phrase oubliée
L’homme est svt plus impuissant qu’il n’y parait et la société est tjs présente pr le lui rappeler. Que la littérature nous en soit témoin !

Bel-Ami, Maupassant
twitté par Nour Tajudeen

Georges Duroy, pauvre jeune homme vivant à Paris, rencontre un vieil ami, Forestier, et devient « journaliste ».

Pauvre jeune homme passe à pauvre type. Il enchaîne les femmes des autres, se bat en duel et va à Cannes pour voir son ami mourir.

Bel-ami séduit la mère Walter, mais finit par se marier avec sa fille. Il est trop heureux car maintenant, il fait même de la politique.


Mme Forestier 
Un coureur de jupons qui ne pense qu’à sa réussite. Le Barney Stinson du 19ème siècle, l’arrivisme en prime. J’aurais dû m’en douter.

Duroy 
On ne peut pas m’en vouloir d’être parfait. De toute façon, je ne me sens pas coupable et je compte même m’en servir pour réussir.


Selon une féministe
Encore une vision machiste de cette société patriarcale où les hommes se servent des femmes pour atteindre leur but.

Selon un futur député 
Maintenant, tt le monde croit que les hommes politiques sont tous malhonnêtes. C’est faux, moi j’ai mérité ma place. Votez pour moi ! Svp L

La phrase oubliée
Durant la nuit, Du Roy se réveilla en sursaut, pris d’une angoisse soudaine. Il décida alors d’aller se promener vers Notre Dame de Lorette.


Orgueil et Préjugés, Jane Austen
twitté par Marine Therme

Angleterre – fin 18° :
Les 5 sœurs Bennett : famille bourgeoise provinciale.
BUT : trouver époux pour assurer avenir social & financier.
(137 caractères)


Charles Bingley (riche célibataire) séjourne ds voisinage. Mme Bennett lui présente Jane : l'aînée.
Darcy : Ami de CB, dissuade du mariage.
(140 caractères)


Elisabeth (soeur J.) hait D.
Or, D. E. veut l'épouser malgré l'avis – 2 sa puissante tante car E. classe sociale basse. Fin +
(O&P de J.A.)
(141 caractères)


Selon Elisabeth
Je suis vive et dès le premier instant, j'ai été frappée par votre fierté, votre orgueil, et votre mépris égoïste des sentiments d'autrui.
(137 caractères)
Selon Darcy
Fermeriez vs les yeux s/ ces offenses, si votre ♥  propre n'avait pas été froissé par la confession honnête des scrupules qui m'ont lgt empêché de prendre 1 décision ?
(144 caractères)

Lecteur 1
Malentendu, quiproquo, regard erroné, mauvaise interprétation, différence sociale = bcp de détours pr un simple roman d'amour. Trop long !
(138 caractères) 

Lecteur 2
1 des plus fines analyses s/ la société britannique du 19°. Au ♥ de la passion qui dépasse préjugés & fierté. Leçon de vie. Beauté-écriture.
(140 caractères)

Le mot de la fin
Reconnaissance éternelle du couple envers le rôle involontaire mais entremetteur de l'oncle et de la tante d'E. essentiel à leur union. (Ϙ de fin)
(136 caractères)